Qu’est-ce que le « coffee badging » ?

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Depuis la crise sanitaire et la démocratisation du home office, notre rapport au travail a profondément changé et de nouvelles tendances ont émergé.

Parmi elles, le coffee badging, que l’on pourrait littéralement traduire par « café badge ».

Cette nouvelle pratique consiste à faire une apparition au travail de quelques heures et de rentrer travailler chez soi.

Et ce, pour diverses raisons. Car si certains employés en télétravail s’y adonnent par besoin de socialiser et de garder le contact avec leur équipe, d’autres s’en servent pour faire brièvement acte de présence lorsqu’ils y sont obligés.

Selon un sondage Owl Labs, 58% des employés hybrides (qui alternent jours de télétravail et de présentiel) auraient déjà eu recours au coffee badging. Parmi les habitués figurent 62% d’hommes et 38% de femmes, les milléniaux étant les plus gros adeptes. 

Se réapproprier le bureau en douceur

Apparu Outre-Atlantique au moment où les entreprises ont commencé à rappeler leurs employés au bureau, le coffee badging semble être devenu un moyen de réinvestir les lieux en douceur. Car après deux années passées en télétravail, il n’est pas toujours évident de reprendre le chemin du bureau.

Alors pour que la pilule passe mieux, certains salariés ont pris l’habitude de faire une apparition au travail durant les jours de présence obligatoire, pour interagir avec leurs collègues, s’informer des projets en cours, être vus, participer à la vie interne de l’entreprise… et rentrer travailler chez eux.

C’est en quelque sorte une façon de contourner les règles imposées par leur direction en faisant acte de présence (et en badgeant le cas échéant), mais pour quelques heures seulement. 

Car comme le souligne auprès du site HRmorning Anthony Nyberg, professeur de management à l’Université de Caroline du Sud (Etats-Unis), « le fait d’être au bureau ne favorise pas la productivité des employés et peut même les empêcher de terminer leur travail ».

Notamment à cause du bruit environnant, de l’agitation ou encore de la fatigue due au temps de transport durant les heures de pointe. Autant de facteurs auxquels ils n’étaient plus habitués et qu’ils appréciaient de ne plus avoir à subir.

En outre, le coffee badging permet aux salariés de rester connectés au collectif, tout en continuant à travailler dans l’intimité et la tranquillité de leur domicile.  

Être remarqué par son manager 

Mais c’est aussi un moyen d’être remarqués par leur hiérarchie. Notamment « lorsque les managers récompensent les employés pour leur présence plutôt que pour leur productivité », commente le spécialiste.

Car malgré la popularisation du travail à distance, le présentéisme reste encore très ancré dans notre culture.

A tel point que selon le KPMG 2023 CEO Outlook report, qui a interrogé 400 PDG américains, 87% d’entre eux se disaient prêts à récompenser leurs salariés qui revenaient au bureau avec des promotions et/ou des augmentations.

Les limites du coffee badging

Selon Anthony Nyberg, le coffee badging n’est pas néfaste en soi si les salariés sont productifs chez eux et continuent d’effectuer leur travail. Mais dans les faits, cela reste parfois difficile à évaluer. « On ne sait pas exactement combien d’employés viennent, partent et ne travaillent plus le reste de la journée », explique l’expert.

La pratique peut aussi devenir problématique si les employés viennent uniquement pour badger, être vus et filer sans prendre le temps d’interagir avec leurs collègues ou de s’investir dans la vie de l’entreprise et les projets en cours.

Ou encore, quand l’entreprise n’a pas autorisé ce genre de pratique et qu’elle est réalisée en douce. « Ces brèves visites des employés peuvent être positives, si elles sont acceptées par les organisations et utilisées comme un moment de partage d’informations et de création de liens, estime l’expert. Et à condition que les employés fassent bon usage de ce temps de présence. Qu’ils soient au bureau deux heures par jour ou une journée entière n’a pas d’importance. Ce qui compte, c’est que leurs objectifs et ceux de l’entreprise soient atteints ».

Les « coffee badgers » doivent en effet rester engagés et investis pour ne pas entacher leur image et créer des tensions.

Liz Villani, fondatrice du mouvement #BeYourselfAtWork, redoutent justement dans une interview accordée à Stylist UK qu’un écart se creuse entre certains collaborateurs : « Ceux qui ‘badgent’ régulièrement risquent de devenir une sous-culture impopulaire parmi les employés. L’absurdité d’un tel comportement ne fera alors que s’accentuer et les plus engagés commenceront à avoir une opinion négative des coffee badgers ».

En somme, comme chacune des nouvelles tendances qui vient transformer le monde du travail, le coffee badging présente des avantages et des inconvénients. Et comme face à chaque nouveauté, les avis des professionnels et spécialistes divergent.

Il appartient donc à chaque entreprise de repenser ses propres normes en matière de flexibilité et de temps effectif de travail. Car comme l’a souligné Frank Weishaupt, PDG de Owl Labs : « la traditionnelle journée de travail de 8 heures au bureau ne semble plus du tout d’actualité ». 

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Journaliste société, je m’intéresse particulièrement aux sciences humaines et sociales (psychologie, sociologie et philosophie), au féminisme et aux thématiques santé, bien-être et work. Passée par LCI, TF1, L'Express, Metronews, Madame Figaro et France Soir, j'ai également été rédactrice en chef adjointe de Pourquoi Docteur. J'écris actuellement pour Welcome to the Jungle, Mindhealth, MindRH ainsi que pour plusieurs entreprises.

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